Étude de cas : Grève des infirmières à Edmonton (Alberta) en 1988
par Natalie Zacharewski

Natalie Zacharewski
Coordinatrice de l’éducation
Natalie est une professionnelle de l’éducation muséale basée à Edmonton, en Alberta. Elle se passionne pour la création de possibilités d’apprentissage pour les élèves de tous âges par le biais d’expériences immersives basées sur l’enquête. Elle a travaillé dans des musées et des institutions patrimoniales au Canada et aux États-Unis, comme les musées de Burlington, le Diefenbunker lu musée canadien de la guerre froide et au Colonial Williamsburg. Elle a été instructrice pour le cours sur les programmes publics dans le cadre du programme de certificat en études muséales de l’Alberta Museums Association. Elle a également travaillé avec la British Columbia Museums Association en tant que consultante en éducation muséale, aidant les petits musées à développer des programmes éducatifs. Natalie est titulaire d’une maîtrise en histoire de l’Université d’Ottawa, avec une spécialisation en histoire du Canada, des États-Unis et du genre.
Dans cette étude de cas, les apprenants exploreront la grève des infirmières de 1988 en Alberta.
Sous les thèmes de l’intervention de l’État dans les conflits de travail et de la santé et de la sécurité publiques, les étudiants utiliseront la pensée curatoriale pour établir des liens avec les conversations entourant les mouvements syndicaux à l’échelle nationale et internationale.
Objectifs
Le mouvement des neuf heures et l’adoption de la Loi sur les syndicats ouvriers de 1872 servira de cadre pour examiner les événements entourant le monde du travail dans l’histoire du Canada.
Dans la présente étude de cas, les élèves se pencheront sur la grève des infirmières à Edmonton en 1988. En s’intéressant plus particulièrement aux thèmes de l’intervention de l’État dans les conflits de travail et de la santé et de la sécurité du public, les élèves feront appel à leurs capacités de réflexion pour établir des liens avec des discussions en cours entourant le mouvement syndical aux niveaux national et international.
Niveaux
5e à 9e année
Thèmes
- Intervention de l’État dans les conflits de travail
- Santé et sécurité publique
Aperçu de l’étude de cas
[TRADUCTION] « Le gouvernement peut adopter toutes les lois qu’il veut, mais il ne peut pas empêcher les gens de faire la grève… Vous pouvez faire intervenir l’armée et imposer un retour au travail, mais est-ce qu’on peut réellement forcer les gens à travailler? Non. On peut menacer les gens, peut-être même les menacer de mort s’ils ne travaillent pas. Mais si ces gens acceptent la menace et sont prêts à en subir les conséquences, alors c’est un échec et cela ne ramènera pas les gens au travail. »
—Margaret Ethier, présidente, United Nurses of Alberta, 1980–1988
Le 25 janvier 1988, plus de 14 000 infirmières de l’Alberta débrayent. Les négociations relatives à leur contrat de travail ont échoué sur la question des hausses salariales, entre autres. Cette grève touche 133 hôpitaux et centres de soins de longue durée, sauf l’hôpital de l’Université de l’Alberta, où les infirmières appartiennent à un autre syndicat. Il s’agira de la dernière grève provinciale déclenchée par les United Nurses of Alberta (UNA).
Mais ce qui complique la situation, c’est que cette grève est illégale. En 1983, le gouvernement de Peter Lougheed fait adopter le projet de loi 44, qui interdit aux employés des hôpitaux, incluant les infirmières et infirmiers, de faire la grève. Lorsque le gouvernement de son successeur, Don Getty, rencontre les représentants de l’UNA pour entamer des négociations en 1987, l’interdiction de grève était en vigueur. Tout au long de ces longues négociations, chaque partie interprète la question des réductions d’effectifs différemment : l’UNA refuse catégoriquement ces réductions d’effectifs et le gouvernement considère que l’UNA n’est pas en position de force à la table des négociations.
En janvier 1988, lors d’une réunion de l’UNA, de nombreuses infirmières expriment leur insatisfaction quant à l’offre présentée par le gouvernement. Cependant, si elles décident de déclencher une grève, il s’agira d’une grève illégale. Il faut consulter les membres :
« Êtes-vous prêtes à faire la grève pour obtenir une meilleure offre? »
Même si la Commission des relations de travail déclare que la tenue d’un vote de grève est illégale, les infirmières passent au vote le matin du 22 janvier 1988. Bev Dick, qui sera plus tard la vice-présidente de l’UNA, se souvient que les infirmières allaient voter dans une roulotte à l’hôpital Misericordia d’Edmonton (les votes antérieurs, qui étaient alors tout à fait légitimes, s’étaient tenus à l’intérieur).
Le 27 janvier, la procureure générale intérimaire, Elaine McCoy, accuse l’UNA d’outrage au tribunal en matière pénale. La cour commence à inculper individuellement les infirmières d’outrage au tribunal. À la fin de la grève, plus de 75 accusations individuelles avaient été portées.
Le 29 janvier, l’UNA est citée à comparaître le lendemain à une audience pour outrage au tribunal en matière pénale. Les exigences du gouvernement provincial comprennent une amende de 1 million de dollars, ainsi que la saisie des fonds et actifs du syndicat. Le 4 février, un tribunal déclare l’UNA coupable d’outrage criminel et la condamne à payer une amende de 250 000 $ dans un délai de cinq jours. Si les infirmières ne retournent pas au travail immédiatement, elles feront face à des mesures disciplinaires et possiblement à un licenciement. Les infirmières maintiennent le cap et répondent qu’elles continueront de faire du piquetage jusqu’à ce qu’elles aient signé une convention collective négociée et équitable. Le syndicat paye l’amende le 9 février. Alors que ses représentantes sont devant le tribunal, elles reçoivent un avis de motion concernant une deuxième accusation d’outrage criminel.
Le vendredi 12 février, 82 % des infirmières votent en faveur d’une meilleure offre et d’un retour au travail. Même si l’on peut débattre de l’efficacité de la grève, de nombreuses personnes jugent qu’elle a atteint son objectif, puisqu’aucun poste n’a été aboli. Le mouvement a eu des répercussions positives sur les négociations qui se sont déroulées dans les dix années suivantes. L’UNA a reçu des amendes totalisant 426 750 $ en raison de cette grève. D’autres syndicats sont intervenus pour l’aider à payer cette somme.
Au moment du lancement des Jeux olympiques d’hiver de Calgary, le 13 février, les urgences des hôpitaux d’Edmonton sont ouvertes à nouveau, sauf à l’hôpital de l’Université de l’Alberta. En effet, le personnel de ce service d’urgence bénéficie d’un congé de trois semaines après avoir tenu le fort pendant la grève qui a touché l’ensemble de la province.
Questions d’enquête
Avec l’ensemble des élèves, répondez aux questions suivantes :
Est-ce que l’État (gouvernement local ou fédéral) a le droit d’interdire une grève lorsque la sécurité du public est en danger?
Est-ce que les travailleurs essentiels (médecins, infirmières et infirmiers, fournisseurs de produits alimentaires, etc.) devraient être encadrés par des organismes de réglementation différents en raison de leur statut?
Imaginez que vous êtes une travailleuse ou un travailleur essentiel : comment composer avec la quête d’un traitement équitable, sans négliger le caractère essentiel de votre travail?
Tenue d’un journal
Étude de photos d’archives

Étudiez cette photo, et ensuite répondez aux questions suivantes :
Que voyez-vous dans cette photo?
En quoi les affiches traduisent-elles les réflexions des grévistes?
Réfléchissez à un autre moment où vous avez vu de telles affiches. Que disaient-elles? Est-ce qu’elles véhiculaient les objectifs des grévistes ou des manifestants?
Lien avec des événements d’actualité
1. Lisez cet article
2. En groupes, discutez de ces questions et inscrivez vos réflexions dans un journal :
Quels sentiments cette situation suscite-t-elle pour vous en ce qui concerne les travailleurs de la santé au Canada?
La santé mentale de ces travailleurs devrait-elle être davantage priorisée dans le contexte des avantages sociaux dont ils bénéficient?
Selon vous, comment les problèmes de santé mentale peuvent-ils nuire aux soins prodigués par les travailleurs essentiels de première ligne?
Quel est le lien avec le mouvement des neuf heures?
Le 18 avril 1872, le gouvernement fédéral de John A. Macdonald introduit la Loi sur les syndicats ouvriers, la première loi canadienne sur le travail, qui accorde aux travailleurs le droit de se regrouper en syndicats. Même s’il s’agit d’une manœuvre politique pour nuire à l’éditeur George Brown en réaction aux revendications des travailleurs d’imprimerie, cette loi met la table pour le mouvement des neuf heures et ouvre la voie au développement du mouvement syndical au Canada.
La grève des infirmières en Alberta de 1988 est reliée à la Loi sur les syndicats ouvriers puisqu’elle invoque le droit fondamental des travailleurs de se rassembler pour exiger des hausses salariales, l’amélioration des heures de travail ou des avantages sociaux. Même si la grève a été jugée illégale par le gouvernement provincial, les infirmières de l’Alberta luttent pour leur droit de se rassembler et de négocier un contrat de travail plus équitable.
Projet phare
Faites une vidéo TikTok
1. Déterminer
Que devrait savoir votre public au sujet de la grève des infirmières en Alberta de 1988? Conseil : Trouvez l’inspiration dans les questions d’enquête.
2. Rédiger
Organisez les sections parlées, les éléments visuels, les transitions et les autres composantes de votre vidéo. Voici quelques thèmes à explorer :
- Intervention de l’État dans les conflits de travail
- Santé et sécurité publique
3. Jouer et filmer!
- Quelles tendances sur TikTok pourriez-vous exploiter pour présenter les faits? Votre démarche doit être APPROPRIÉE!
- Quels effets pourriez-vous utiliser?
- Quels sons conviendraient à votre vidéo? Encore une fois, vos choix doivent être APPROPRIÉS!
- Votre vidéo doit durer de 15 à 60 secondes.
4. Monter
Ajoutez des filtres, textes, effets et autres éléments qui peuvent ajouter à la qualité de votre vidéo, sans sacrifier la valeur éducative.
5. Diffusez!
• Ajoutez des mots-clics pertinents à votre vidéo.
• Une fois votre vidéo prête, diffusez-la sur TikTok —–OU—–
• Envoyez votre vidéo à votre enseignant.
Questions d’évaluation
- Est-ce que le sujet et le titre de la vidéo sont pertinents (et appropriés) au regard du contenu et des exigences? Est-ce que cette vidéo propose une expérience éducative de qualité?
- Est-ce que la vidéo présente une valeur éducative et divertissante?
- Est-ce que la vidéo présente de manière fidèle l’information contenue dans le travail écrit?
- Est-ce que les composantes audio et visuelles sont claires, cohérentes et APPROPRIÉES?
- Est-ce que la vidéo est de grande qualité?
- Est-ce qu’elle permet de répondre aux questions : qui, quoi, où, quand, pourquoi et comment?
Aperçu du projet fourni avec l’autorisation de :
https://content.schoolinsites.com/api/documents/da9e0c5eab384d31a766b00064cde72d.pdf
Références
Boxwell, Josephine. « Against the Law: The 1988 Nurses’ Strike, » City of Edmonton (May 11, 2021). https://citymuseumedmonton.ca/2021/05/11/against-the-law-the-1988-nurses-strike/.
Canadian Labour Congress. « Unions Become Legal in Canada (But Picketing Is Outlawed). » https://canadianlabour.ca/uncategorized/twlh-apr-3/#:~:text=On%20April%2018%2C%201872%2C%20the,to%20associate%20in%20trade%20unions.
Crocket, Moya. « ‘We Let Rip’: The Messy History of the Nurses’ Strikes in 1988 » in Huck magazine (November 23, 2021). https://www.huckmag.com/perspectives/the-messy-history-of-the-nurses-strikes-in-1988/.
Howse, John. “Alberta’s Defiant Nurses” in Maclean’s magazine (February 1988). https://archive.macleans.ca/article/1988/2/8/albertas-defiant-nurses.
United Nurses of Alberta. « Remembering Alberta’s 1988 Nurses Strike » (February 2013). https://www.una.ca/116/25-years-later-remembering-the-1988-nurses-strike.