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L’Histoire, force d’influence : comment le passé façonne les peuples et les individus

Par John Heckman – Le Tattooed Historian

Les amateurs d’histoire qui connaissent John Heckman le surnomment « l’Historien tatoué ». Après avoir obtenu son diplôme en histoire et avoir travaillé aux côtés du Corps of Engineers de l’armée américaine, John entame un cheminement en 2015 pour permettre à l’histoire de sortir de ses frontières et rejoindre de nouveaux publics plus diversifiés. Dans le cadre de son travail sur de nombreuses plateformes de médias sociaux ainsi que son balado, Le Tattooed Historian Show, John a eu la chance de collaborer avec des universités, des organismes sans but lucratif, le Service des parcs nationaux des États-Unis, le Département américain de la défense américain et plusieurs autres organismes des États-Unis et du Canada afin de donner vie au passé. Il habite en Pennsylvanie.

Il y a des moments dans la vie où l’histoire qui se fraie un chemin jusqu’à vous. Où elle s’impose à vous. C’est très tôt dans ma vie que j’ai ressenti cette force qu’a l’histoire sur le cours de nos vies. En fait, si ce n’était pas de l’histoire, je ne serais peut-être pas ici aujourd’hui.

À l’été 1988, j’étais un garçon d’à peine sept ans. Déjà, à ce jeune âge, je n’avais pas eu la vie facile. C’était l’année où j’avais dû abandonner l’idée de jouer au baseball avec mes amis parce que j’avais commencé à souffrir d’asthme. Et quelques années auparavant, mon père nous avait quitté, ma mère et moi, et je ne le voyais que pendant quatre heures tous les deux vendredis. Les enfants de mon école se moquaient de moi parce que mes parents étaient divorcés et que je n’étais pas capable de garder le rythme lors des cours d’éducation physique. Et pendant les récréations. Pour un enfant, c’est une entrée en matière quelque peu ardue.

Or cet été-là, je suis parti en voiture pour aller visiter un endroit situé 40 kilomètres à l’est de ma ville natale et qui allait avoir un impact permanent sur moi : Gettysburg, en Pennsylvanie.

Ce voyage a été un des rares moments où j’ai pu passer beaucoup de temps avec mon père. C’était en fait la première occasion que j’avais d’apprendre à le connaître et à le comprendre. Il a, comme à son habitude, gardé le silence pendant la grande majorité du périple. Il ne s’est rien passé de marquant pendant de grandes portions de notre voyage. Mais quand nous sommes arrivés sur le champ de bataille qui s’étendait à perte de vue, j’ai été instantanément intrigué par ce lieu qui avait suscité l’imagination de millions de personnes dans le monde.

Qu’est-ce qui motivait autant de gens à venir ici, me suis-je demandé? C’était bondé de monde, bruyant et je ne comprenais tout simplement pas pourquoi tout le monde s’intéressait autant à ces grands espaces parsemés de centaines de pierres tombales et de monuments. Notre visite a eu lieu le 2 juillet 1988, lors du 125e anniversaire de la grande bataille qui s’est déroulée à cet endroit même pendant la Guerre de sécession.

Les idées se précipitaient dans ma tête. Je voulais en savoir davantage. J’avais finalement trouvé quelque chose qui m’appartenait et que personne ne pouvait m’enlever. J’avais tant perdu quand mon père est parti et quand j’ai dû quitter l’équipe de baseball. C’est à ce moment clé que l’histoire a sauvé une vie, la mienne.  

Pour certains d’entre nous, l’histoire est une échappatoire de la routine quotidienne, d’un emploi insatisfaisant, d’un conflit avec un être cher, enfin de toutes ces choses qui ne se déroulent pas comme nous l’avions prévu. L’acte même de se perdre dans les pages de l’histoire nous permet d’apercevoir de nouveaux chemins et de trouver d’autres façons de surmonter les obstacles auxquels nous sommes confrontés.

Penchons-nous un instant sur la force du récit historique. Les événements ou les figures historiques ont non seulement forgé des nations, mais ils ont également contribué à façonner les individus que nous sommes. Nous tirons des leçons de l’histoire, ce qui est à éviter. Nous sommes enclins à vouloir aller plus loin que nos ancêtres et ne pas refaire les mêmes erreurs. Nous cherchons à comprendre le monde qui nous entoure, même dans les moments les plus difficiles.

L’histoire m’a permis de découvrir et de vivre l’expérience de vie d’autres personnes à travers une vitrine historique. Je pouvais m’enfermer dans ma chambre et lire pendant des heures et mettre de côté le moment présent pour mieux comprendre le passé. Et tout ça avant l’arrivée de l’Internet!

Nous remarquons les mêmes tendances dans notre société en ce qui a trait aux divers formats de contenu en ligne. Moments déterminants Canada mène d’une main de maître des programmes de récits historiques présentés sur des plateformes numériques et fait ainsi rayonner l’histoire de notre nation. Nous sommes les acteurs de la révolution des sciences humaines et sociales numériques. La preuve? Consultez les projets historiques présentés par Moments déterminants Canada et leur impact notable sur de nouveaux publics. Nous n’avons aucun doute sur le rôle que les étudiants et élèves jouent dans l’interprétation des connaissances historiques. C’est pourquoi nous présentons ces travaux sur le site de Moments déterminants Canada.

Les jeux historiques nous permettent de pénétrer dans un monde virtuel pour résoudre des énigmes ou pour explorer au gré de notre curiosité. La montée en popularité de ce type de jeux sur des plateformes comme Twitch démontre l’intérêt que nous avons en tant que société de regarder quelqu’un plonger dans une simulation d’un moment historique (qu’il soit ancré dans la « vérité » ou revu sous un angle fictionnel). J’y ai même trouvé un endroit de prédilection pour jouer à des jeux historiques et échanger avec des historiens de partout dans le monde!  

Les baladodiffusions qui explorent le passé proposent des occasions d’écouter et d’apprendre de ceux qui en savent plus long que nous sur des moments clés de l’histoire. Notre cerveau et notre intellect peuvent, et ce littéralement, être stimulés à différents niveaux par les médias sonores où des personnes parlent des détails les plus complexes de notre histoire.

Les projets de réalité augmentée ou virtuelle nous permettent également de plonger dans les lieux et les époques de nos ancêtres. Nous n’avons que gratté la surface des possibilités et de l’attrait du pouvoir de ce média visuel; c’est en explorant la technologie et les moyens de permettre au grand public de participer que nous pourrons exploiter tout le potentiel de ce mode de communication. 

Avant que la pandémie ne chamboule complètement nos vies, j’allais souvent visiter des écoles pour parler d’histoire. J’amenais souvent des artéfacts originaux pour présenter divers événements historiques passés. Si ce type d’apprentissage interactif est aujourd’hui une pratique commune, il n’existait certes pas en 1988 lorsque j’ai découvert Gettysburg. Les technologies d’impression 3D sont en train de révolutionner l’utilisation d’objets pour favoriser l’apprentissage historique, puisque les musées et les groupes d’archives peuvent maintenant produire des copies d’artéfacts historiques qui serviront dans les présentations en classe. Et je crois bien que dans une ou plusieurs de ses classes se trouve un autre élève qui, comme moi jadis, se sent perdu, différent et en quête d’un monde à découvrir.

Nous vivons des moments difficiles. Or des historiens discutent, lors d’entrevues avec les médias, des pandémies qui ont sévi dans le passé pour nous redonner espoir et nous assurer que la vie va éventuellement reprendre son cours normal. En fait, certains historiens clament haut et fort que l’avenir est meilleur et que nous devons aller de l’avant, parce que l’humanité a été éprouvée de la sorte dans le passé et qu’elle a triomphé de l’adversité.

L’histoire ne fait pas que nous fournir des faits et des exemples; elle nous donne de l’espoir. Je n’étais qu’un jeune garçon lorsque j’ai appris, dans les nombreux ouvrages que j’ai lu à propos de la Guerre de Sécession, que nous pouvons surmonter les situations les plus critiques. L’histoire m’a aidé à surmonter l’intimidation, mes difficultés respiratoires et bien plus. C’est entre autres ce qui m’a poussé à aller de l’avant lorsque j’ai choisi la sobriété, il y a presque huit ans. Le passé a été pour moi une source d’optimiste alors que je gérais un long et pénible divorce. Il continue de nourrir en moi une force positive.

Les événements historiques offrent de l’espoir ou un moment de paix, des éléments importants dans notre vie de tous les jours. Et nombreux sont les moments de l’histoire qui causent chez nous du malaise. C’est important d’accepter ses sentiments puisqu’ils nous permettent d’apprendre et de comprendre des erreurs du passé. À nous de saisir cette chance de faire un monde meilleur si nous avons pu comprendre la morale de l’histoire.