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Insuline 100: une histoire ponctuée de hauts et de bas

Par Charlotte Peachey

Peachey vit avec le diabète de type 1 depuis 2014. Elle a passé les six dernières années à voyager dès que l’occasion s’est présentée et, depuis 2017, à travailler au sein du programme des Camps D de Diabète Canada en Ontario. Charlotte aime établir contact avec les membres de la grande communauté du diabète. Elle habite au Royaume-Uni ce qui ne l’a pas empêchée de voyager pour venir passer l’été dans les divers camps du programme. Si Charlotte adore explorer de nouveaux recoins du monde, elle s’est découvert une passion pour le tricot, le crochet et la pâtisserie pendant le confinement!

Il y a de ça à peine six ans, je ne savais pratiquement rien du diabète de type 1 et n’avais aucune idée des défis quotidiens qu’une personne atteinte doit surmonter. Aujourd’hui, je peux clamer avoir vécu les meilleurs moments de ma vie, mais aussi les plus ardus, à titre de personne atteinte du diabète de type 1. J’ai rencontré dans le cadre de mes activités, des personnes incroyables  issues de la communauté du diabète. Chaque jour qui passe me permet d’en apprendre davantage sur cette maladie et ces gens.

L’histoire de mon diagnostic

En 2014, j’étais en vacances en Espagne avec un groupe d’amis lorsque j’ai commencé à ressentir de la fatigue, à avoir très soif et besoin d’uriner fréquemment. J’ai tout de suite pensé que ces symptômes découlaient de notre mode de vie de détente et le temps passé sous le soleil. Un de mes amis a même mentionné la possibilité du diabète, or mon manque de connaissances sur cette maladie et l’absence d’antécédents familiaux de diabète de type 1 m’ont poussée à ne pas m’inquiéter et d’attendre que les symptômes disparaissent d’eux-mêmes.

Quelques jours à peine plus tard, mon médecin m’a recommandé de me rendre immédiatement à l’hôpital pour passer des tests. C’est à ce moment, à l’âge de 23 ans, que j’ai été diagnostiquée du diabète de type 1. J’étais allongée sur le lit d’hôpital, entourée d’appareils médicaux étranges, sous l’œil bienveillant de ma mère. J’ai demandé au médecin : « est-ce que je vais pouvoir partir en Turquie vendredi prochain? ». On était mardi. Je ne pouvais pas imaginer manquer un voyage avec mes amis. Je ne comprenais pas tout ce que j’allais devoir apprendre sur le diabète de type 1. Lorsque j’y repense, la grande naïveté qui m’habitait découlait d’un profond désir de ne pas laisser cette maladie changer ma vie. Que j’allais pouvoir y faire face avec aplomb et surmonter les défis au gré du temps.

Aller de l’avant avec optimisme

De prime abord, j’étais bouleversée de penser que ce diagnostic allait m’empêcher de passer une année à voyager partout dans le monde, un projet auquel je rêvais depuis mon adolescence. Je devais donc trouver une façon d’y arriver! J’ai pris un stylo et un carnet pour monter mon plan de match. 

Où aller? Quoi y faire? Quoi amener? Des questions typiques des grands voyageurs. Mais là, j’avais également une nouvelle liste, celle des actions et équipements me permettant de gérer mon diabète. Ouf!

J’ai commencé par consulter mon équipe médicale au Royaume-Uni; ils ont été compréhensifs et m’ont offert du soutien pour planifier les divers volets de mon voyage. Ils m’ont informée que j’allais devoir trouver des fournitures diabétiques dans d’autres pays, m’adapter aux fuseaux horaires et aux changements d’heure, me munir de la bonne documentation, etc. Un autre aspect important de mon projet de voyage solo était la nécessité de trouver du soutien adapté à ma situation. J’ai donc réservé beaucoup plus de visites guidées que je ne l’aurais fait sans diabète, ce qui m’a permis d’informer mes guides ou des membres du groupe de mon état et des façons de m’aider en cas de besoin. 

Organiser et faire ce voyage est sans contredit une des meilleures idées que je n’ai jamais eues. J’ai fait un saut en bungee, j’ai parcouru la forêt amazonienne à pied et mon diabète a visité tous ces lieux magnifiques avec moi! Oui, j’ai fait des erreurs pendant mon voyage, mais comme j’avais mis en place un bon nombre de précautions, j’ai pu gérer ces situations et profiter au maximum de ce voyage que j’avais mis tant d’efforts à organiser.

Après avoir exploré les paysages de dix pays différents, j’ai choisi de terminer mon périple avec un séjour de cinq mois au Canada. Puisque j’avais eu la chance de voyager à Vancouver et à Toronto avec ma famille, j’avais vraiment envie de revenir au Canada. C’est dans ce beau pays que j’ai eu la chance de découvrir la remarquable communauté du Camp Huronda, un camp de vacances pour enfants atteints du diabète de type 1.      

Les colonies de vacances, où les enfants dorment pendant une semaine ou plus, ne sont pas chose commune au Royaume-Uni et je ne m’attendais pas à découvrir des camps adaptés aux besoins de diverses communautés du Canada. J’ai soumis ma candidature à Camp Canada par le biais de NyQuest, une organisation chargée de recruter de moniteurs de camp de partout dans le monde et de les assigner à un des multiples camps de vacances estivaux canadiens avec lesquels ils collaborent. Après les étapes initiales du processus d’embauche, Camp Canada m’a mise en contact avec le Camp Huronda et j’étais à la fois surprise et épatée de découvrir que Diabète Canada offraient des programmes de colonies de vacances et de camps de jour conçus pour la communauté du diabète de type 1.

Jusqu’à présent, je ne connaissais presque personne atteint du diabète de type 1 et j’étais, avouons-le, encore en train d’apprendre à vivre avec cette maladie. Dès le premier jour de formation du personnel, je me suis sentie accueillie par les autres moniteurs et membres du personnel et j’étais ravie et émue de les entendre partager leur expérience du camp et leur histoire de diagnostic avec autant d’enthousiasme. Puisque j’apprenais à vivre ma vie avec le diabète de type 1, j’avais besoin d’entendre leurs propos francs et l’honnêteté dont ils ont fait preuve. J’ai même découvert des technologies de gestion du diabète dont je n’avais pas encore entendu parler. Ces discussions m’ont permis de comprendre que la gestion du diabète est unique à chaque personne et de l’importance de faire valoir mes besoins pour trouver la méthode et les outils qui me conviennent le mieux.

Une fois les premiers campeurs de l’été arrivés, j’ai vu comment la gestion du diabète faisait partie intégrante de la planification des activités du camp. Tout le monde comprenait la réalité des personnes vivant avec le diabète de type 1. Je n’oublierais jamais ma première expérience du moment des « champions du camp D » dans la salle à manger; c’est une célébration quotidienne des jalons de progrès des campeurs. La joie et l’ambiance de soutien qui remplissaient la salle tous les soirs étaient palpables. C’est alors que j’ai su que je voulais faire partie de cette communauté à long terme.

Se sont ensuivis de nombreux voyages entre le Royaume-Uni et le Canada! Entre 2017 et 2019, j’ai occupé les postes de monitrice des courses à obstacles, de chef d’équipe des courses à obstacle pour ensuite mener le programme de développement du leadership au Camp Huronda. J’adorais revenir au camp été après été pour jouer un nouveau rôle, avec des responsabilités et des défis tout neufs. Mais ce sont les gens qui m’ont motivée à revenir, année après année! Dans le cadre de mes différents postes, j’ai pu enseigner aux participants du camp des compétences techniques et humaines et les encourager à dépasser leurs limites. C’était inspirant de voir les participants et les membres du personnel incarner à tour de rôle des comportements  de gestion du diabète modèles, comme choisir de ne pas participer à une activité pour venir en aide à un camarade qui doit gérer une baisse de taux de sucre et s’encourager les uns les autres à essayer quelque chose de nouveau. Il ne s’agit que quelques-unes des interactions profondément significatives qui ont lieu tous les jours aux camps D. Nous fréquentons les camps D pour avoir du plaisir, en sachant très bien que nous en tirons tous quelque chose d’infiniment plus grand. C’est une communauté où nous sommes tous à l’écoute des autres, prêts à leur offrir du soutien. 

Dans mon rôle de responsable du programme de développement du leadership, j’ai eu le privilège de voir les participants les plus âgés du camp exceller dans des ateliers portant sur les aptitudes en communication, en résolution de problèmes et de conflits et relatives à la vie quotidienne au camp. Le programme leur offre également l’occasion d’acquérir des compétences en observant le travail des membres du personnel dans les activités auprès des groupes de campeurs. Lorsque nous nous réunissons autour du feu de camp, je sais que nombreux d’entre eux reviendront au camp à titre de leaders et qu’ils vont contribuer à enrichir l’expérience des campeurs et stimuler l’empathie qui nourrit notre communauté.

La dure réalité d’une vie avec le diabète de type 1

Ceux qui vivent avec le diabète de type 1 et ceux qui connaissent quelqu’un qui vit avec le diabète de type 1 sont bien au fait des défis que la maladie représente au quotidien. J’ai vécu ma part d’épreuves; il s’agit de mon histoire personnelle avec le diabète de type 1, or je reconnais que j’en suis aux premières étapes de mon parcours avec le diabète et que je vais devoir faire face à d’autres défis dans le futur.

J’ai réagi à mon diagnostic avec une panoplie d’émotions conflictuelles. À 23 ans, j’étais reconnaissante de ne pas avoir eu à gérer une maladie chronique pendant ma jeunesse, tout particulièrement pendant mes études universitaires. Or, j’avais connu une vie sans le joug du diabète et je n’étais pas du tout à l’aise à l’idée de ne plus jouir de cette liberté. C’est probablement pourquoi je suis partie en vacances quelques jours après mon diagnostic. Je suis heureuse d’avoir pris le temps de m’éduquer sur le sujet et de trouver un compromis qui allait me permettre de mener à bien mes projets de voyage tout en prenant le temps de planifier la gestion de mon diabète et de modifier mes plans adéquatement.

J’ai également compris l’importance de mon réseau d’aide et d’y faire appel quand j’en ai besoin. Je vous assure que si j’ai toujours de la difficulté à parler de mon diabète avec mes collègues et certains amis, j’ai su me confier aux personnes qui me sont très chères et je suis toujours prête à partager mon expérience avec ceux qui désirent en savoir davantage. Puisque j’ai dû participer à des réunions lors desquelles je sentais mon taux de sucre baisser et que j’ai déjà été trop nerveuse ou embarrassée pour en parler, je suis maintenant beaucoup plus directe dans mes actions et je n’hésite plus à faire valoir mes besoins. Je réalise maintenant qu’une des meilleures méthodes pour démystifier les idées préconçues sur le diabète est d’éduquer les personnes qui nous entourent. La communauté du Camp Huronda et les discussions qui y prennent place sur une base quotidienne m’ont aidé à me réconcilier avec le rôle que je peux jouer en société.

Comme je l’ai mentionné plus haut, ce récit relate mon expérience personnelle. Grâce à mon parcours ponctué de hauts et de bas, je me sens prête à relever les défis qui m’attendent. J’espère que toutes celles et ceux qui vivent avec le diabète de type 1 ou une autre maladie chronique savent à quel point ils sont résilients!