Souvenirs du Dr Herzberg
par Dr John Stone

John Stone a obtenu un baccalauréat en chimie (avec mention spéciale) en 1966 et un doctorat en spectroscopie moléculaire en 1969, tous deux à l’Université de Reading, au Royaume-Uni. Il est venu au Canada comme chercheur post-doctoral en 1969, travaillant au Conseil national de recherches dans la section de spectroscopie sous la direction de G. Herzberg. Il a ensuite passé une année à l’Académie tchécoslovaque des sciences à Prague avant de revenir au Canada pour poursuivre ses intérêts de recherche à l’Université de Sherbrooke.
En 1972, il est entré dans la fonction publique du Canada, où il a assumé des responsabilités croissantes, d’abord au ministère d’État aux Sciences et à la Technologie, puis au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, au Bureau des affaires internationales du Conseil national de recherches du Canada et enfin à Environnement Canada. Il a acquis une expérience considérable dans le domaine de la science internationale et a servi le Canada par son affiliation au Comité scientifique de l’OTAN, à l’Institut international pour l’analyse des systèmes appliqués, aux conseillers principaux en science et technologie de la CEE-ONU, à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, au Comité directeur scientifique du programme START et en tant que coprésident de l’Accord Canada-Allemagne sur les sciences et la technologie. En 1997, il a été nommé au Bureau du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), plus précisément en tant que vice-président du groupe de travail I, et a depuis été reconduit dans ses fonctions, maintenant en tant que vice-président du groupe de travail II.
Lorsque je suis arrivé au Conseil national de recherches en tant que boursier de recherches postdoctorales vers la fin de l’année 1969, le laboratoire du Dr Herzberg était la mecque de la spectroscopie moléculaire, tant expérimentale que théorique. C’était une époque où la recherche avançait rapidement, avec le développement des spectromètres à micro-ondes et la compréhension du spectre des molécules non rigides.
Des scientifiques du monde entier étaient attirés par le groupe GH pour assister à une conférence, apprendre une technique ou entreprendre leurs propres projets de recherche. Le Dr Herzberg était connu pour ses longues heures de travail (il se présentait au laboratoire tous les jours, sauf le jour de sa naissance, le 25 décembre). Le laboratoire fourmillait constamment d’activité. GH s’intéressait à de nombreux projets de recherche et les scientifiques étaient toujours heureux lorsqu’il venait les visiter, portant son légendaire sarrau blanc, pour faire quelques commentaires ou suggestions.
Le Dr Herzberg était un homme occupé : en plus de diriger le groupe de la spectroscopie, pour lequel son approche consistait à engager les meilleurs scientifiques et à les aider à réaliser de bons projets, il avait ses propres objectifs axés, surtout dans les dernières années, sur le spectre des radicaux libres et sur ses ouvrages de référence sur la spectroscopie moléculaire et atomique. Il était assisté par un technicien de talent, Jack Shoesmith, sa fidèle secrétaire, Miss Thompson, et son assistante de laboratoire, Izabel Dabrowsky.
Le sentiment de faire partie d’une entreprise scientifique collective était accentué lors de nos rencontres autour d’un thé ou d’un café (toujours à la même heure, chaque jour). On tenait également des réunions de groupe où l’on avait l’occasion de parler de nos propres recherches. À l’occasion, lorsque l’un des scientifiques devait prononcer une conférence, il s’exerçait dans l’immense amphithéâtre du chemin Sussex où le Dr Herzberg et son personnel s’installaient tout au fond pour s’assurer que les diapositives étaient bien lisibles.
Pour se détendre, quelques chercheurs traversaient la rue le midi pour s’échapper de la cafétéria du CNRC et manger au restaurant de l’hôtel de ville, où GH nous racontait ses souvenirs scientifiques et même quelques blagues (mais il a toujours refusé l’idée d’écrire sa biographie). Les discussions ne portaient pas que sur la science et les scientifiques. Le Dr Herzberg était un homme cultivé, façonné par sa vaste éducation allemande. Il s’intéressait beaucoup à la musique et avait une belle voix de basse. Il mangeait toujours la même chose : une soupe avec des craquelins émiettés, à l’image de sa grande modestie.