À la découverte de Gerhard Herzberg
Par Denisa Popa
Cette article est aussi en la Canadian Science and Technology Historical Association blog.
L’année en cours marque le 50e anniversaire de l’attribution du prix Nobel de chimie au scientifique germano-canadien Gerhard Herzberg. Celui-ci a mérité le célèbre prix en reconnaissance de « sa contribution à la connaissance de la structure électronique et de la géométrie des molécules, particulièrement des radicaux libres » (CRSNG). Pour souligner cet anniversaire, Defining Moments Canada/Moments déterminants Canada, en collaboration avec Patrimoine canadien, le Conseil national de recherches du Canada, l’Université de la Saskatchewan et ESRI Canada, planifie actuellement un projet commémoratif national : Herzberg50.
Gerhard Herzberg, Ph.D.

Gerhard Herzberg a vu le jour à Hambourg, en Allemagne, le 25 décembre 1904. Dès son plus jeune âge, il a développé un vif intérêt pour les sciences, en particulier l’astronomie, la physique et la chimie (Stoicheff, 2002). Selon sa biographie, il a suivi des cours supplémentaires de physique moderne alors qu’il était encore à l’école secondaire (Stoicheff, 2002). Ces leçons dirigées par le professeur Wilhelm Hillers lui ont permis de se familiariser avec les théories fondamentales de la chimie, de la physique et de la mécanique quantique (CRSNG; Stoicheff, 2002). Gerhard Herzberg a d’abord envisagé une carrière en astronomie, mais il n’avait pas les fonds nécessaires pour la poursuivre (CRSNG). C’est en 1924 qu’il a finalement décidé de s’orienter vers le génie physique et s’est inscrit à l’université technique de Darmstadt (CRSNG). Vers l’âge de 24 ans, il était déjà bien établi dans son domaine, ayant publié un certain nombre d’articles universitaires sur la physique atomique et moléculaire, outre l’obtention d’un doctorat en génie physique en 1928 (CRSNG).
Une fois diplômé, Gerhard Herzberg a obtenu une bourse de recherche postdoctorale à l’université de Göttingen (Université de la Saskatchewan). Il est retourné par la suite à Darmstadt, où il a consacré cinq ans à des recherches sur la spectroscopie (Université de la Saskatchewan). La spectroscopie consiste en l’analyse de la capacité des molécules et des composés à émettre et à absorber différentes longueurs d’onde de lumière et de rayonnement électromagnétique (Herschbach, 1999). La compréhension des propriétés de la lumière et du rayonnement émis (ou absorbé) permet d’approfondir les connaissances sur les caractéristiques des molécules et des composés, y compris leur structure et les types de liaisons chimiques qu’ils contiennent (Herschbach, 1999).

Alors qu’il terminait ses études postdoctorales, Gerhard Herzberg a rencontré Luise Hedwig Oettinger, une étudiante universitaire dont la recherche était aussi axée sur la spectroscopie (Stoicheff, 2002). Le couple s’est rapproché et s’est finalement marié le 30 décembre 1929 (Stoicheff, 2002). Au fil des ans, Luise, qui a obtenu son doctorat à l’université de Francfort en 1933, a coécrit un certain nombre d’articles scientifiques avec son mari (Stoicheff, 2002). Le mode de vie universitaire des Herzberg en Allemagne a pris fin en 1934 lorsque le régime nazi a été porté au pouvoir et a commencé à imposer de nouvelles restrictions à l’encontre des juifs dans les établissements d’enseignement et les instituts de recherche (Stoicheff, 2002). Herzberg a été informé qu’il ne serait plus autorisé à enseigner à Darmstadt en raison des origines juives de Luise (Stoicheff, 2002; Université de la Saskatchewan). Le couple Herzberg a déménagé à Saskatoon dès l’année suivante avec l’aide de John W. T. Spinks, un chimiste qui le visitait à Darmstadt et s’était lié d’amitié avec lui, et de Walter C. Murray de l’Université de la Saskatchewan, et grâce à un financement de la Fondation Carnegie (CRSNG).
De 1935 à 1945, Gerhard Herzberg a poursuivi sa carrière à l’Université de la Saskatchewan, où il a mené des recherches sur la spectroscopie moléculaire et atomique, en plus de publier trois nouveaux ouvrages (CRSNG). Il a passé les trois années suivantes à l’observatoire Yerkes de l’université de Chicago à étudier « les spectres d’absorption de nombreuses molécules présentant un intérêt sur le plan de l’astrophysique » (CRSNG). En 1948, les Herzberg sont revenus au Canada lorsque Gerhard a été invité à « mettre sur pied un laboratoire de recherche fondamentale en spectroscopie » au Conseil national de recherches du Canada (CNRC) (CRSNG). C’est au cours de son séjour au CNRC que le scientifique a fait l’une de ses principales découvertes : l’observation des spectres du radical méthylène (CH2) (Stoicheff, 2002). Les scientifiques décrivent les radicaux libres comme des espèces chimiques qui possèdent un électron célibataire (non apparié) dans la couche de valence externe (Winnewisser, 2004). Ces radicaux libres sont des intermédiaires importants dans diverses réactions chimiques (Herschbach, 1999). C’est la contribution de Gerhard Herzberg à la compréhension des radicaux libres qui lui a valu le prix Nobel en 1971 (CRSNG). Gerhard Herzberg a eu deux enfants. Il s’est éteint le 3 mars 1999 à l’âge de 94 ans (Herschbach, 1999).


Outre ses nombreuses réalisations scientifiques, on se souviendra de Gerhard Herzberg pour son amour de la musique et pour son plaidoyer en faveur de la recherche scientifique fondamentale et de l’adoption de bonnes politiques scientifiques (Stoicheff, 2002). Tout au long de sa vie, l’homme de science a développé une passion pour la musique, apprenant à jouer du violon dans sa jeunesse, puis suivant des cours de chant à l’âge adulte – organisant même des concerts pour sa famille et ses amis (Stoicheff, 2002)! De plus, il a consacré de nombreuses heures à la défense et à la promotion de la valeur de la recherche scientifique fondamentale et pure à une époque de débats intenses sur les politiques scientifiques et sur l’orientation à donner à la recherche au Canada (Stoicheff, 2002). Dans ses discours, il a notamment mis en lumière le « large fossé dans la compréhension des questions scientifiques entre les scientifiques et les non-scientifiques » (Herzberg, p. 2, 1970). Dans une tentative de rapprocher les sciences et les humanités, il s’est activé à mettre en valeur les « liens entre la science et la société » et « la dimension culturelle de la science », à la fois dans le domaine de l’éducation et le contexte des politiques (Herzberg, p. 10, 1973). Gerhard Herzberg considérait les sciences comme « une vocation créative, au même titre que l’art et la musique » (Herzberg, p. 4, 1973). Le projet commémoratif Herzberg50 portera plus largement sur la philosophie de Herzberg et fera ressortir les relations interdisciplinaires entre les sciences pures et les sciences humaines – un enjeu qui revêt toujours une grande pertinence dans le Canada de nos jours.
Ressources supplémentaires
Réferences
Herschbach, Dudley. « Obituary: Gerhard Herzberg (1904-99) », Nature, vol. 398, no 670 (avril 1999).
Herzberg, Gerhard. « Science and Society », titre d’une conférence (Basterfield) sur la science et la société donnée au campus de Regina de l’Université de la Saskatchewan le 12 octobre 1973, archives du Conseil national de recherches Canada.
Herzberg, Gerhard. « Science and Culture », titre d’un discours sur la science et la culture donné à l’occasion de la cérémonie de collation des grades à l’Université de Windsor, le 30 mai 1970, archives du Conseil national de recherches Canada.
Mant, Madeleine. « La santé dans l’histoire selon la démarche curatoriale : un cadre de travail éducatif » (4 août 2020), Defining Moments Canada/Moments déterminants Canada. definingmomentscanada.ca/fr/nouvelles/la-sante-dans-lhistoire-selon-la-demarche-curatoriale-un-cadre-de-travail-educatif/
Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Page « À propos du scientifique : Gerhard Herzberg », dernière modification datant du 23 juillet 2020.
www.nserc-crsng.gc.ca/Prizes-Prix/Herzberg-Herzberg/Scientist-Scientifique_fra.asp
Hoffman, B. Gerhard Herzberg: An Illustrious Life in Science, Ottawa, Éditions Sciences Canada, 2002.
Université de la Saskatchewan, « History of the Department: Dr. Gerhard Herzberg, 1904-1999 ».
artsandscience.usask.ca/chemistry/department/history.php
Winnewisser, G. « Gerhard Herzberg– A personal appreciation », Canadian Journal of Chemistry vol. 82, no 6 (juin 2004), p. 673-675.